Pour avoir beaucoup lu que le 16 juin 1607 était une date importante pour la paroisse Saint Sulpice d'Auverné, confirmé par les fait que les premiers actes inscrits dans les registres paroissiaux sont de juin 1607, nous avons voulu savoir quelle démarche avait conduit à cette décision. L'événement est inscrit sur le registre des baptême de 1607. Comme nous ne sommes pas en mesure de le transcrire, nous avons copié un document déposé aux archives diocésaines de Nantes. Cette not
notes.
La paroisse est la subdivision de base d'un diocèse ; c'est à la fois un territoire et une communauté de personnes.
L'église paroissiale est le lieu de rassemblement des fidèles pour les célébrations des cérémonies qui rythment la vie des paroissiens (messes, fêtes religieuses, mariages, baptêmes, enterrements); c'est une obligation canonique de fréquenter l'église paroissiale (Saint Pierre d'Auverné -Grand-Auverné), même si l'on habite à la frontière de la Chapelle-Glain, par exemple. Ce principe est énoncé dans l 1er canon du concile de Nantes en 658.
Un prêtre (le curé) à la charge de la communauté ; selon la taille et/ou la population de la paroisse, il peut-être assisté d'un ou plusieurs vicaires.
En fonction de la géographie, de la répartition de l'habitat, la paroisse peut être divisée en quartiers, regroupant des hameaux, des frairies. Elle peut également avoir des paroisses-filles (succursale, trève, fillette, feuillette..) de manière à permettre aux habitants éloignés de disposer d'une église et de pouvoir assister à un service minimum, sous l'autorité du curé de la paroisse-mère.
Jusqu'au début du XXème siècle, les individus s'identifient avant tout à leur paroisse (esprit de clocher) et tout est prétexte à rivalité avec les paroisses voisines (église, ornements sacerdotaux, artisanat, sport ..).
Le procès
Sous le règne du bon roi Henri IV, si tout le monde mange de la poule au pot le dimanche, en Auverné, on décèle des aigreurs d'estomac : il commence à y avoir du tirage entre la paroisse et sa feuillette St Sulpice.
En 1982, on célèbre les 25 ans de l'abbé Édouard Deniaud comme curé à Petit-Auverné et les 375 ans de la création de la paroisse St Sulpice. A cette occasion, il est donné lecture (1) de la transcription du compte-rendu sur le conflit qui opposa la paroisse-fille à la paroisse-mère, et du décret qui résultera du jugement de l'évêque de Nantes.
-
Abbé Thoreau, 20 Août 1850_archives historique du diocèse de Nantes ; Reproduction ci-dessous.
Dans la requête présentée à Mgr Charles de Bourgneuf, évêque de Nantes, par les paroissiens de la paroisse d'Auverné habitant les cantons ou traits (2) de Saint Sulpice, de Lezé et du Don, le 14 octobre 1602, il est dit :
« la paroisse d'Auverné est de si grande étendue que les prédécesseurs avaient été contraints d'y faire bâtir deux églises : l'une dans le grand bourg d'Auverné, située en l'une des extrémités de la paroisse, l'autre dans le bourg de Saint Sulpice , située au milieu de la paroisse.
Cette situation à pour conséquence que la plupart des sépultures trentains et autres prières se font en l'église et cimetière de Saint Sulpice au lieu de se faire dans l'église d'Auverné.
Le Recteur de la Paroisse d'Auverné devait et était tenu de dire ou faire dire chaque dimanche une grand'messe avec prône en l'église de Saint Sulpice, à une heure telle, que les paroissiens des traits de Saint Sulpice, de Lezé et du Don y puissent assister.
Pour cet effet les Recteurs étaient tenu de mettre homme d'église digne et capable , demeurant aux environs du dit bourg St Sulpice pour y faire sa charge avec honnête salaire : ce qui aaurait été observé de tout temps immémorial, même par Messire Claude Cathelinais, actuel recteur de la paroisse d'Auverné, jusqu'au dimanche 22 septembre 1602 , où il aurait fait célébrer la grand'messe dès 6 heures du matin sans avoir voulu attendre les fidèles des dits traits qui sont la plupart distants d'une lieue du dit bourg et de 2 lieues du dit bourg d'Auverné, alors que la grand'messe était habituellement célébrée , environ des 8h à 9h du matin. »
Mécontents on s'en doute, profitant de cette occasion, les habitants de St Sulpice font remarquer que dans leur église il n'y a pas de tabernacle pour la réserve eucharistique en vue de la communion des malades, ni de fonds baptismaux ; ils signalent les inconvénients de cet état de fait : des malades sont morts sans avoir reçu le Saint Sacrement, des enfants sont décédés lors de leur transport au bourg d'Auverné pour le baptême et cela est dû à une trop grande distance des lieux.
Il faut mentionner, ce qui n'est pas dit dans la requête, le mauvais état des chemins et qu'à cette époque (début XVIIe) , il n'y a pas de routes.
Dans la sentence d'érection de la paroisse Saint Sulpice d'Auverné (1607) il est fait mention des eaux qui « fluent et regorgent en grande abondance, aux ruisseaux et rivières qui passent par la paroisse d'Auverné et de St Sulpice. »
La requête conclut à ce qu'il fut ordonné que le Recteur d'Auverné aura son coadjuteur ou vicaire perpétuel qui sera habitué et résidera au bourg Saint Sulpice pour y faire la charge et fonction pastorale à la place du Recteur et qu'il sera payé honnêtement sur les revenus des dîmes que le recteur perçoit sur les terres appartenant aux demandeurs.
qu'il y aura des fonds baptismaux dans l'église de Saint Sulpice et un tabernacle (sacraire) pour la réserve eucharistique.
le tout en attendant que la paroisse d'Auverné soit divisée en deux et régie par deux recteurs. Vu sa grande étendue et sa nombreuse population et attendu que les revenus du « bénéfice » d'Auverné sont plus que suffisant pour la nourriture et l'entretien du Recteur et du Vicaire perpétuel.
et en conséquence le dit Recteur Cathelinais et autres défendeurs et opposants déboutés de leurs oppositions et condamnés aux dépends et intérêts entre les dits demandeurs et le dit Cathelinais.
12 et 13 juin 1605
à l'occasion de la visite pastorale de Mgr l'Évêque à la paroisse d'Auverné et de Saint Sulpice : ouverture d'un procès verbal « pour mieux connaître la vérité » par l'information des faits et les réclamations des uns et des autres, tant des habitants du bourg d'Auverné et des autres cantons appelés traits du bourg, le trait des bois et le trait de la Haie, que des habitants des traits de St Sulpice, Lezé et du Don.
Ce procès verbal note en particulier les distances des villages et cantons des dits bourgs d'Auverné et St Sulpice.
Le Recteur d'Auverné, Cathelinais, pour débouter les demandeurs y offre de faire dire tous les dimanches, à la manière accoutumée, une messe paroissiale au dit village de St Sulpice, excepté les fêtes solennelles : Toussaint, Noël, Circoncision, les Rois, Pâques, Pentecôte, Ascension, Trinité, St Sacrement, St Jean Baptiste, St Pierre et Pau, dédicace de l'église, toutes les fêtes de Notre Dame -sauf celle de la visitation- et certains dimanche : 1er de l 'Avent, Septuagésime, Passion, Rameaux, les jours des Rogations, le jour de la Transfiguration, le mercredi des cendres : « auxquels jours n'est dit aucune messe dans la dite chapelle, à raison que les paroissiens du dit Auverné s'assemble en leur dite église paroissiale d 'Auverné. »
Si on fait le compte des fêtes, dimanches et jours, c'est au moins la moitié, autrement dit, le recteur coupe la poire en deux.
Les enquêtes faites par les uns et les autres montrent bien que que plusieurs ont été frustrés des saints sacrements tant en raison de la distance, que par le débordement des ruisseaux et rivières qui passent par la dite paroisse d'Auverné et St Sulpice.
A partir de septembre 1606, jusqu'à la fin mai 1607, ce sont des chassés-croisés de réclamations, objections, de contredits et de réponses entre les deux parties. Le 13 mai 1607 les demandeurs, répondant aux contredits du recteur Cathelinais, font l'offre de loger le Vicaire perpétuel, de faire valoir le revenu de la Cure d'Auverné, 400 livres, outre le gain du dedans de l'église et de salariser au surplus le dit vicaire jusqu'à 100 livres de pension chaque année.
16 juin 1607 : conclusion du procès et jugement : sanction d'érection
« la dite requête (16 mai 1607) signifiée au dit Cathelinais, les conclusions du promoteur de Nantes, le tout diligemment vu et considéré,
le Saint Nom de Dieu premier invoqué,
nous avec l'avis du Conseil sur ce pris,
ayant égard à la distance des lieux et incommodités des dits paroissiens, désirant, autant qu'il nous est possible, procurer le bien et le salut des âmes et obvier aux inconvénients qui pourraient ci-après à venir pour la susception et administration des sacrements nécessaires,
avons ordonnés et ordonnons qu'il sera mis et établi par le dit recteur d'Auverné un prêtre capable de l'administration des sacrements, lequel sera tenu de résider au dit St Sulpice pour y faire le service selon la coutume des autres chapelles et fillettes qui sont situées en diverses paroisses de cet évêché, à savoir y dire la messe à heure compétente, suivant les statuts, règlements et ordonnances synodales de ce dit évêché, les jours de fêtes et dimanches, fors et excepté : le dimanche des Rameaux, le jour et fête de Pentecôte, la fête du Saint Sacrement de l'autel et le jour Saint Pierre patron de l'église matrice et principale du dit Auverné, auxquels jours les dits paroissiens seront tenus d'assister en la dite église d'Auverné pour y ouïr le divin service ;
aux dits jours ne sera célébré qu'une messe au dit Saint Sulpice et à heure que les assistants à icelle puissent assister à la grande messe paroissiale en la dite église d'Auverné, laquelle messe matutinale sera salarisée aux dépends des dits paroissiens de Saint Sulpice suivant leur ancienne coutume ;
outre faire dire une messe matutinale, les jours, fêtes et dimanches pour les serviteurs et les servantes ;
et outre, fera le dir vicaire, en la dite église de Saint Sulpice, l'eau bénite, proclamation des bans, mariages, et bénédictions nuptiales, publication de monitoires, baptisera, ouïra en confession et portera le Saint Sacrement de l'Eucharistie, parce qu'il sera payé et salarisé par le dit recteur d'Auverné , si mieux le dit recteur n'aime prendre et accepter l'offre des dits paroissiens des cantons du dit Saint Sulpice de payer et salariser le dit prêtre et vicaire et faire valoir au dit recteur par leurs mains le revenu de la dite cure, laquelle somme de 400 livres annuelles, sans y comprendre le baise-mains et domaine annexe à la dite cure ;
et pour cet effet avons permis et permettons aux dits habitants de Saint Sulpice d'ériger en leur dite église le sacraire et fonds baptismaux, ainsi qu'est accoutumé aux autres lieux où se font les fonctions rectorales ;
en outre avons condamné et condamnons les dits paroissiens et habitants, suivant leur offre, de loger le dit vicaire bien et dûment selon sa qualité et le fournir de meubles requis et nécessaires.
Et sera notre présent jugement exécuté par provision, attendu le fait dont est question, nonobstant opposition ou appellations quelconques et sans préjudice d'icelle et avec ce avons mis et mettons hors de cour et procès sans dépens.
Fait et passé à Nantes en notre manoir épiscopal le 16 juin 1607
ainsi signé : Charles, évêque de Nantes
« La sentence ci-devant a été levée, prononcée en la grande salle du manoir épiscopal de cette ville de Nantes devant Mgr l'Évêque du dit lieu, en présence de Maître François Priou procureur des paroissiens d'Auverné habitant aux traits et canton de Saint Sulpice, Lezé et le Don pour lequel est présent noble homme Jean Guibourg, sieur Duclos, conseiller du Roi et auditeur des comptes en Bretagne, l'un d'iceux demandeur d'une part , sur défaut de messire Claude Cathelinais, Recteur de la dite paroisse d'Auverné et autres habitants intervenant au dit procès et Maître Nicolas de la Ramée et Thomas Ouary leurs procureurs et défendeurs d'autres parties dénommées en la dite sentence, après l'heure de 5 h d'après midi du samedi seizième jour de juin mil sept cent sept ».
Ce contentieux à probablement laissé des traces dans les relations entre les habitants des 2 paroisses. Par exemple, est-ce un hasard si les 2 communes n'appartiennent pas au même canton ?
La paroisse est donc scindée: tout est en place pour qu'au moment de la Révolution deux communes soient créées.
Les usages résisteront longtemps aux nouveaux noms Petit-Auverné et Grand-Auverné. Ainsi on trouve dans les textes "Petit-Bourg d'Auverné", des cartes géographiques "le Petit-Bourg". Dans les années 60 on pouvait rencontrer des gens qui connaissait le "P'tit Bourg" et pas "Petit-Auverné !!!